Les épiceries de village sont essentielles à leur dynamisme, au lien social et au bien-être de la population, pourtant elles se font de plus en plus rares. Ainsi, d’après les chiffres de l’INSEE, ce sont aujourd’hui près de 62 % des communes françaises qui sont dépourvues de petits commerces, contre 25 % en 1980. Ces magasins peuvent pourtant atteindre une belle rentabilité, à condition de bien préparer son projet et de savoir gérer intelligemment son commerce. Vous souhaitez ouvrir une petite épicerie de village ? On vous donne quelques conseils pour concrétiser ce projet !
Quel type de commerce de détail alimentaire ouvrir dans une zone rurale (supérette, épicerie fine, épicerie associative ou communale, en ligne, etc.) ?
Les zones rurales présentent des spécificités qu’il convient de bien prendre en compte lors de la création d’un commerce, et plus particulièrement d’un commerce de détail alimentaire. Ainsi, la clientèle différera grandement par rapport à celle d’une grande ville. Il faudra donc, notamment grâce à l’étude de marché, bien étudier ses futurs clients, leurs habitudes de consommation, leur pouvoir d’achat, leur catégorie socioprofessionnelle, leurs attentes concernant les prix, la diversité et la qualité des produits, leurs moyens de communication, les services qui pourraient les intéresser (par exemple la livraison à domicile, la commande en ligne, etc.) ou encore leur lieu d’habitation et leur lieu de travail.
Il faudra déterminer le concept idéal de commerce de détail alimentaire selon le type de clients présents dans la zone d’implantation envisagée. Ainsi, une épicerie fine conviendra peut-être moins aux besoins de la population générale qu’une supérette vendant à la fois des denrées alimentaires et des produits de première nécessité. Certaines valeurs affichées par le commerce auront également un plus fort impact sur les clients potentiels présents dans la zone de chalandise : l’épicerie peut s’approvisionner uniquement ou en grande majorité auprès de producteurs locaux, se concentrer sur la vente de produits bios et responsables, etc.
Il faudra également veiller, toujours grâce à l’étude de marché, à bien analyser la concurrence directe et indirecte dans les environs : les grandes surfaces, les petits commerces de proximité, les épiceries du même type ou d’un type différent, etc. Il peut s’avérer judicieux de s’installer à proximité d’autres commerces de type différent, ou d’une autre épicerie vendant des produits complémentaires, car une concentration de commerces dans un même endroit permet d’attirer plus de clients. Attention, contrairement aux zones urbaines dans lesquelles la zone de chalandise d’un commerce est souvent limitée, les épiceries et autres petits magasins installés en zone rurale ont un grand rayon d’attraction de clients. Il convient donc d’analyser l’environnement concurrentiel au sein du village dans lequel l’entrepreneur compte s’installer, mais également dans tous les villages environnants.
Enfin, il existe des modèles de gestion économique alternatifs qui peuvent s’avérer particulièrement intéressants pour la survie des petits commerces dans les villages. C’est notamment le cas des épiceries participatives, qui se concentrent sur la vente de produits locaux, de belle qualité et vendus sans marge, et qui sont gérées de façon associative. Ces épiceries sont créées et tenues par les adhérents, qui consacrent chacun quelques heures par mois au projet. Les communes sont généralement favorables à ce genre d'initiative et peuvent ainsi mettre à disposition un local commercial.
Est-ce rentable d’ouvrir une épicerie dans un village ?
Au vu de la chute du nombre d’épiceries présentes en zone rurale au cours des dernières décennies, la question de la rentabilité d’un tel commerce se pose. Les épiceries de village font en effet face à une concurrence importante notamment avec le développement des grandes surfaces, qui proposent un plus grand choix de produits et à un coût souvent moins élevé. On observe cependant ces dernières années un regain d’intérêt pour les petits commerces de proximité. La population française tend de plus en plus à changer ses habitudes de consommation afin de faire vivre les magasins de quartier. Elle privilégie également la qualité des produits plutôt que leur quantité, et ira par exemple plus facilement s’approvisionner en viande auprès d’un boucher de village plutôt qu’en grande surface.
Par ailleurs, les épiceries de village attirent une clientèle fidèle et particulière : les personnes âgées qui préfèrent limiter leurs déplacements en voiture, les personnes ayant besoin d’un ou deux produits spécifiques et ne souhaitant pas se déplacer en grande surface juste pour cela, les personnes travaillant aux alentours, par exemple les agriculteurs, etc.
L’ouverture d’une épicerie peut donc s’avérer rentable à condition d’avoir bien choisi son emplacement et son concept, et de savoir limiter ses dépenses quotidiennes. L’entrepreneur peut par exemple effectuer des économies d’échelle en achetant des produits en gros, mais devra alors veiller à limiter au mieux le gaspillage alimentaire. Il peut également faire l’acquisition d’un matériel peu coûteux en énergie, en particulier en ce qui concerne la conservation des produits frais ou surgelés. Il peut par ailleurs optimiser l’efficacité de ses équipes en embauchant des personnes compétentes, en les formant aux bonnes pratiques en magasin, en leur achetant du matériel d’aide à la manutention, etc.
Faut-il une formation pour devenir épicier ?
Il n’y a aucune formation obligatoire pour devenir épicier ou pour ouvrir sa propre épicerie. Toute personne majeure peut ainsi devenir commerçant dès lors qu’elle n’a pas été condamnée en justice pour crime, arnaque, recel, vol, etc. Une certaine expérience professionnelle et/ou un diplôme sont cependant recommandés afin d’avoir toutes les compétences nécessaires pour la création et la gestion de l’entreprise.
Comment créer une épicerie ouverte la nuit ?
La création d’une entreprise de nuit répond aux mêmes obligations que la création d’une entreprise classique. En ce qui concerne les épiceries, la seule différence réside dans la vente d’alcool la nuit, qui est encore plus strictement réglementée que la vente d’alcool en journée. L’entrepreneur devra ainsi suivre une formation obligatoire à cet effet, délivrée par un organisme agréé.
Certaines communes ou préfectures peuvent réguler l’activité des commerces durant la nuit. Il convient donc de se renseigner sur la réglementation en vigueur dans le territoire envisagé pour sa future épicerie.
Comment effectuer la reprise d’un fonds de commerce (prise de contact, calcul de la rentabilité, négociation du prix, etc.) ?
La reprise d’une épicerie de village présente des avantages non négligeables :
- L’entrepreneur n’a pas à créer une nouvelle épicerie et s’épargne donc un grand nombre de démarches.
- L’entrepreneur acquiert un commerce déjà équipé et fonctionnel, avec son personnel et sa clientèle.
- Les contrats auprès des fournisseurs sont déjà négociés, mais peuvent être renégociés si nécessaire.
- L’entrepreneur connaît, sauf mauvaise surprise, l’état de santé financière de l’épicerie. Cette dernière peut avoir une rentabilité avérée, auquel cas le projet entrepreneurial présente peu de risques, ou avoir des difficultés financières, auquel cas l’entrepreneur pourra réfléchir avant la reprise aux solutions à mettre en œuvre afin de redresser rapidement la situation.
Il convient avant toute chose de bien se renseigner sur les raisons qui poussent le propriétaire actuel à se séparer de son commerce. S’agit-il d’un départ à la retraite ? Souhaite-t-il se lancer dans un nouveau projet professionnel ? Ou bien l’entreprise rencontre-t-elle des difficultés financières ? Si oui, quelles sont-elles, et existe-t-il des solutions ?
Il faudra ensuite estimer la valeur du commerce. Cette étape est complexe. Dans l’idéal, le cédant a fait appel à une société extérieure pour estimer la valeur commerciale de son entreprise. Le prix déterminé par le cabinet d’experts sera alors fiable, bien que probablement non sujet à négociations. Par contre, si le cédant a lui-même estimé la valeur de son fonds de commerce, l’entrepreneur peut lui aussi tenter de déterminer le prix réel de l’épicerie afin de s’assurer que sa valeur n’a pas été surestimée.
Il existe plusieurs méthodes, qui se basent :
- Sur le chiffre d’affaires de l’épicerie. L’entrepreneur devra alors appliquer un coefficient à ce chiffre d’affaires. Attention cependant à bien analyser les évolutions du chiffre d’affaires au cours des dernières années, et à prendre en compte tout changement de contexte récent qui pourrait avoir un impact sur le futur chiffre d’affaires de l’épicerie.
- Sur la rentabilité de l’épicerie. L’entrepreneur devra également appliquer un coefficient à la rentabilité de l’entreprise, qui dépend d’un grand nombre de facteurs (attractivité du commerce, localisation, état des équipements, etc.).
- Sur les éléments constitutifs de l’épicerie. L’entrepreneur pourra alors comparer la valeur du magasin avec la valeur d’autres commerces du même type et mis en vente récemment.
Quel budget pour ouvrir une petite épicerie ?
Selon le concept et la taille de la future épicerie, le budget peut varier de 60 000 à plus de 160 000 euros. Si les locaux des commerces installés en zone rurale coûtent souvent moins chers que ceux des commerces installés en plein centre-ville d’une grande commune, il existe des frais supplémentaires qu’il ne faut pas négliger. Il peut par exemple y avoir une difficulté d’approvisionnement en marchandises selon l’emplacement du village, ou encore la nécessité d’aménager un parking ou de s’installer à proximité d’un parking, car une grande partie des clients viendront faire leurs courses en voiture.
Parmi les divers éléments à prendre en compte lors du calcul du budget de création d’une épicerie de village, il y a bien évidemment les frais liés au local commercial (acquisition, location, remise aux normes d’accessibilité et de sécurité incendie, remise en état, aménagement, décoration, etc.) et au matériel, mais également les frais comptables, les frais d’assurance, les frais d’embauche, les frais de création d’entreprise, l’achat du premier stock de marchandises, le droit d’entrée si l’entrepreneur souhaite rejoindre un réseau de franchise, les coûts du permis d’exploitation nécessaire à la licence pour la vente d’alcool, etc.
Ce budget sera inclus dans le prévisionnel financier, qui intéressera particulièrement les banques lors de la recherche d’un crédit professionnel.
Existe-t-il des aides et des subventions pour ouvrir une épicerie de village ?
Parce que de plus en plus de zones rurales se trouvent dépourvues de petits commerces, le gouvernement a lancé un programme de reconquête, qui vise à encourager les entrepreneurs à s’installer dans les villages et petites villes dans lesquelles aucun magasin de proximité n’est établi, et ce en leur proposant de participer au financement d’amorçage nécessaire à la mise en œuvre du projet.
Ainsi, l’État a créé une enveloppe de 12 millions d’euros sur la période 2023-2024, qui seront répartis à hauteur de 80 000 euros par projet. Cette aide à l’investissement concerne les commerces sédentaires multi-services mais également les commerces itinérants, dès lors qu’ils desservent une zone rurale.
Les entrepreneurs privés souhaitant bénéficier de cette subvention doivent au préalable obtenir le soutien de la commune où ils souhaitent s’implanter. Ils pourront alors se présenter à la préfecture concernée afin de soumettre leur projet à ce programme de reconquête.
Pour les épiceries sédentaires, l’aide financière concernera essentiellement l’acquisition des locaux et les travaux de remise aux normes et d’agencement nécessaires au bon fonctionnement du commerce. L’État pourra également aider à l’acquisition de matériel professionnel, à hauteur de 20 000 €, plus 25 000 euros si le projet a un caractère économique innovant ou s'il répond à une problématique de développement durable (par exemple en se concentrant sur le circuit court).
Les épiceries itinérantes pourront quant à elles bénéficier d’une aide pour l’acquisition du véhicule de tournée.
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